Les nouveaux pistolets d'ETA

Publié le par Jean Chalvidant

Chaque fois qu’ETA fait parler d’elle, mon téléphone chauffe. Les radios et les télévisions  veulent absolument avoir une lecture des événements. Et avec le vol de 350 pistolets à Vauvert, près de Nîmes, ma journée a été bien remplie. Et pour une fois, j’ai affiché ma perplexité. Comment en effet interpréter cette action de commando, avec faux gendarme et kidnapping de la fille et de deux petits enfants (dont un de 9 mois) de la gérante de l’entreprise d’armement SIDAM ?

 

En fait, le mot qui résume la situation est celui de « rupture », un terme bien à la mode en ce moment. Mais de quelle rupture s’agit-il ? Première interprétation : il s’agirait d’une action de l’organisation pour marquer son mécontentement devant la lenteur des négociations, car après tout l’annonce du cessez-le-feu remonte à sept mois et rien de concret n’a encore été annoncé, si ce ne sont quelques conversations tenues sous le  boisseau à Oslo ou en Suisse. Tout cela tarde et n’est pas bon signe ; côté ETA on s’impatiente et d’après les informations en ma possession, la bande aurait annoncé que si un signe fort n’était pas adressé par Madrid avant la fin décembre, le lien fragile sera irrémédiablement cassé. Et les attentats reprendront.

 

Deuxième interprétation : une rupture au sein même d’ETA, entre mous et durs. C’est-à-dire entre les partisans de la négociation, avec à leur tête Josu Ternera, et les durs, représentés par Txeroki. Ce serait cette branche qui aurait imaginé et réalisé l’opération, mais n’attendons pas de leur part un quelconque démenti, ce n’est pas dans les habitudes de la maison.

 

La troisième hypothèse, que je n’ose envisager, serait que la trêve ne serait qu’un trompe l’œil, une opération de propagande, semblable à celle de 1998, qui avait permis à ETA de reconstituer ses forces, recruter de nouveaux adeptes, délimiter de nouvelles cibles, et réapprovisionner les arsenaux. Comment ne pas y penser, car on ne se procure pas 350 armes de poing pour aller chasser la palombe.

 

Toutes les pistes sont ouvertes à l’interprétation. Mais cette histoire de « cessez-le-feu permanent » commence à sentir diablement mauvais. Et ce n’est pas le vote de confiance des députés européens hier à Strasbourg qui fera bouger les lignes. En Espagne, le pays reste coupé en deux, entre ceux, derrière le PP, qui considèrent qu’aucune négociation n’est possible sans qu’ETA ne dépose officiellement les armes, et ceux – le gouvernement - qui sont prêts à tout pour obtenir une paix précaire, même au prix de concessions politiques, en l’occurrence la cession de la Navarre à Euskadi, et pourquoi pas un référendum d’autodétermination en vue d’une indépendance.

 

Zapatero a ouvert la boîte de Pandore et sa marge de manœuvre devient chaque jour plus étroite. Il ne lui reste que deux mois pour enfin préciser ses intentions, affirmer sa volonté et éviter un faux pas historique. Kontuz !, comme disent les Basques sur les routes mal balisées !

Traduction littérale : attention !

 

Publié dans chalvidant

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