Le suspect retour d'Iparretarrak

Publié le par Jean Chalvidant

Jeudi dernier, trois engins explosifs artisanaux ont été désamorcés au Pays basque français. Déposés dans des poubelles à proximité de l’aéroport de Biarritz-Parme de la sous-préfecture de Bayonne et de l’office de tourisme de Cambo-les-Bains, ils étaient composés d’une cartouche de gaz de camping, d’un réveil, de fils électriques et de poudre noire. Ils n’auraient causé que des dégâts limités en cas d’explosion, car l’absence de détonateur rendait la réussite de l’opération aléatoire. La police, alertée par les pompiers, n’a eu aucun mal à les trouver et à les désactiver. Un coup de fil anonyme avait en effet indiqué l’emplacement des engins. Une méthode utilisée depuis des années par ETA.

 

D’emblée, on pense naturellement à la mouvance séparatiste comme étant à l’origine du simulacre d’attentat. Ce qui ne résiste pas à l’examen, ETA ayant tout intérêt à prouver aux autorités madrilènes que sa zone d’influence est sous contrôle et qu’elle entend respecter la trêve qu’elle a elle-même proposée. Qui donc alors est derrière la pose de ces bombinettes ? Iparretarrak ? L’organisation française a été décimée depuis février 1988, date de l’arrestation de Philippe Bidart, Joseph Etxebeste, Jean-Paul Iribarren, Pierre Aguer et Philippe Laskarrain. Et la contagion de la violence ne semble pas depuis avoir contaminé le sol français. Un seul bémol à noter : en août dernier, un engin similaire avait déjà été découvert dans une poubelle à proximité de l’office de tourisme de Bayonne, suite à l’appel d’un homme se réclamant ouvertement… d’Iparretarrak.

 

Ne mésestimons pas cette référence. Si le groupe n’existe plus depuis 18 ans, ses leaders incarcérés, ses structures inexistantes, il existe un vieux fond indépendantiste en Soule, en Basse Navarre et au Labourd. Et il suffit d’une seule personne pour faire la tournée des poubelles, déposer un paquet-cadeau et faire la une des journaux. Le simple fait que les explosifs aient été mal montés rappelle une vieille plaisanterie des années quatre-vingt, lorsque l’on se gaussait des séparatistes français qui étaient infoutus de confectionner une bombe. Bis repetita ne placent pas toujours.

 

Le correspondant anonyme s’adressant en langue française aux pompiers a laissé une revendication : que le gouvernement français s’implique dans le processus de paix engagé en Espagne. Terminant sur un comminatoire « Le Pays basque n’est pas à vendre », les mêmes mots employés en août. Nul n’en doutait, merci. Et d’annoncer que son « organisation hibernera jusqu’au 16 avril », date traditionnelle de l’Aberri Eguna.

 

Il convient de ne pas accorder trop d’importance à cet événement. Le séparatisme violent n’a jamais pris au Pays basque français. Quoi qu’on en dise et qu’on veuille absolument prouver, des deux côtés de la Bidassoa, on est très proche, et aussi très éloigné. Et la volonté d’ETA d’englober dans son futur grand pays rêvé les trois régions basques françaises n’a que peu d’avenir, comme l’ont prouvé depuis des décennies les résultats électoraux des radicaux Et les bouteilles de camping-gaz d’un maître chanteur solitaire en mal de publicité ne changeront rien à cette évidence.

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