Il est sur la photo !

Publié le par Jean Chalvidant

Si, sur ses vieux jours, José Luis Rodríguez Zapatero se retourne sur son passé, il s’épanchera certainement  sur son petit album de photos jaunies, marques d’un temps où l’Espagne ne s’aimait pas et où à sa plus grande surprise, il gouvernait un pays meurtri par les 192 morts de  l’attentat d’Atocha et la menace du dernier groupe terroriste encore en activité, ETA. Je doute toutefois que compulser son classeur de son passage à la Moncloa lui prenne beaucoup de temps, car il aura été le chef de gouvernement espagnol (hormis Franco) qui aura le moins voyagé à l’étranger, et celui qui aura le moins rencontré de chefs d’Ētat du monde entier.

 

On me rétorquera que la photo avec George W. Bush existe. Ce qui est vrai, encore que la rencontre prit  15 secondes, montre en main, ponctuée d’un « salut l’ami » de l’Américain, ce qui était à la fois cordial et un peu court. Une certitude : Zapatero n’aime pas voyager, pas plus qu’il n’a d’appétence pour la politique étrangère ou pour les rencontres exotiques. Ainsi à fin mars dernier n’avait-il pas mis un pied hors d’Espagne depuis 100 jours, ce qui en dit long sur son côté casanier. Une occasion toutefois lui était offerte ce week-end de se racheter avec la visite du Pape à Valence, une ville meurtrie par l’accident de métro ayant fait plus de quarante morts la semaine dernière. Et, gaudeamus igitur, la photo entre les deux hommes a été prise !

 

Zapatero se reconnaît agnostique, bien qu’il se soit marié à l’église (en janvier 1990 à Nuestra Señora de Sonsoles, Ávila) et que ses deux filles Laura et Alba soient baptisées. Pour réduire les tensions avec le Vatican, outré de l’instigation du mariage homosexuel ou de la remise en cause du financement de l’Ēglise, il a nommé Francisco Vázquez, socialiste très catholique et maire de La Corogne, ambassadeur au saint-Siège. Un cautère sur une jambe de bois, car José Luis  a fait savoir qu’il n’assisterait pas à la messe dominicale et pontificale, rompant avec la coutume dans ce pays foncièrement catholique. Même Felipe González n’avait pas osé l’enfreindre. Un défi à la majorité catholique, compréhensible si l’on sait qu’il est vraisemblablement franc maçon. On se souvient que dans des cas semblables, les marxistes Fidel Castro, Daniel Ortega et Jaruzelski avaient assisté aux messes de Jean-Paul II, tandis que Jacques Chirac et Lionel Jospin s’en étaient abstenus, sous prétexte que la France est aconfessionnelle. D’où le commentaire désabusé du porte parole du Vatican, Joaquín Navarro-Valls, « je préfère ne rien dire », et les insultes lancées à son encontre tant à l’aéroport de Manises que devant le Palais de l’Archevêché par des dizaines de milliers de fidèles, outrés par l’attitude de leur chef de gouvernement. « Fous le camp avec ETA, tes copains » ou « ETA et ZP, vous êtes la même merde ». La charité chrétienne en a pris un coup.

 

Reconnaissons à Zapatero le mérite de la cohérence, sinon celui de l’hospitalité. Par contraste  et comme d’habitude, c’est le Roi qui est arrivé en tête à l’applaudimètre, lui qui n’a eu de cesse depuis 1976 de vouloir réconcilier les deux Espagne, lui qui en privé montre des signes d’inquiétude devant les initiatives tous azimuts de l’apprenti sorcier de la Moncloa. Quant à la rencontre entre ZP et Benoît XVI, « elle fut extraordinairement cordiale », selon les milieux gouvernementaux. Saleté de langue de bois !

 

Publié dans chalvidant

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