La désastreuse gestion du cas De Juana

Publié le par Jean Chalvidant

 

C’est le troisième fois que je consacre cette chronique à De Juana Chaos. Beaucoup d’honneur, à lui qui n’en mérite guère. Et savoir s’il mange désormais correctement, si ses estomacs se sont décollés, s’il fait plus ou moins bien pipi m’indiffère. Ce sont des questions que ses 25 victimes ne se posent plus. Plus importantes à mon sens sont les conséquences de sa libération masquée. Car en Espagne, la pilule a du mal à être avalée, même s’il s’agissait de respecter le droit, même si, pour une fois, Zapatero a eu un geste d’homme d’Etat, en n’hésitant pas à se mettre sciemment le peuple à dos.

 

 

Ce samedi matin, il ne doit pas être déçu. On annonce pour cet après-midi, à partir de 17 heures, la plus grosse manifestation jamais tenue à Madrid, dépassant en nombre celle ayant suivi l’assassinat du jeune conseiller municipal d’Ermua, Miguel Angel Blanco, en juillet 1997. Le thème est le même : le rejet d’ETA et de la violence. Il est aussi plus politique : la population n’a plus confiance en Zapatero pour résoudre le conflit, lui qui n’a pas su saisir la main tendue par ETA et est resté inerte durant 9 mois. Lui qui a ostenciblement courbé le dos devant le chantage d’un assassin jouant les victimes. Le mot d’ « incompétent » lancé par le PP doit résonner à ses oreilles. Il était outrancier hier, il l’est moins depuis quelques semaines.

 

 

Les enquêtes d’opinion qu’il a sur son bureau concordent toutes : les candidats socialistes se présentant aux élections autonomes (concernant les Communautés) risquent pour la plupart de se rétamer le 27 mai. Aux municipales, le risque serait atténué, grâce à l’implication locale des impétrants, mais la saignée laissera des traces, à seulement dix mois des Législatives, qu’il ne peut se permettre de perdre. Et tout cela à cause d’un obscur sicaire qui, dans tout autre pays au monde, serait derrière les verrous pour encore une dizaine d’années !

 

 

L’exaspération est à son comble. De l’hôpital Donostia où il a été transféré, des bruits filtrent. De Juana reçoit visites sur visites, à tel point que les autorités ont dû mettre en place une liste d’attente, que l’étarre examine pour sélectionner à sa guise ses interlocuteurs. Il croule sous les félicitations, les bouquets de fleurs et par la fenêtre, entend avec délectation les cris de soutien que des manifestants viennent lui adresser. Pathétique.

 

 

Quant au PP, il boît du petit lait. Remis à flot dans les sondages, il dépasse en intentions de vote le PSOE et récupère l’exaspération populaire lassée par tant de tergiversations et tant de reculades. Ce qui ne signifie pas pour autant qu’il gouvernera de nouveau l’Espagne en mars 2008, car faute d’obtenir la majorité absolue, il devra composer avec les petits partis nationalistes, basques, catalans, galiciens, canariens, qu’il s’est mis à dos depuis des années. On pourrait donc arriver à une situation semblable à celle des récentes élections catalanes, où le PSOE avait été devancé en sièges et en voix par CiU, mais avait fait élire José Montilla grâce à l’appoint des partis de gauche ou verts.

 

 

Nous n’en sommes pas là. Contentons-nous de suivre des yeux les manifestants qui vont battre le pavé ce soir. On parle de renaissance de l’ « esprit d’Ermua ». Alors que la porte était encore entrouverte il y a quelques mois, quel retour en arrière !

Publié dans chalvidant

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